Encore une fois, le calendrier de manifestations de visitberlin.de nous a offert une sortie particulièrement intéressante (site ici), dont le sous-titre était "Recherche de traces entre la synagogue et les Hackesche Höfe, ensemble de cours intérieures de la ville". La guide, à qui trois autres personnes inscrites ont fait faux bond, a commencé par une introduction historique dans une de ces cours face à nous deux assis sur un banc, pas loin du café confortable où nous avions attendu l'heure du départ de la visite. Une fois de plus, une visite intéressante donc, et une fois de plus, un thème pas bien rigolo.
Sur la façade de la nouvelle synagogue devant laquelle nous avions rendez-vous, Dômeu a trouvé les inscriptions hébraïques jolies. La synagogue en elle-même est très belle avec sa coupole dorée placée non pas au-dessus de la Torah mais à l'avant du bâtiment pour qu'on la voit de la rue. Malheureusement, la guide nous a expliqué que l'intérieur de la synagogue, reconstruit de manière moderne pour montrer la rupture due au nazisme l'ayant détruite, ne vaut pas le détour. Cependant, la guide avait assez de choses à raconter dehors dans ce quartier.
L'histoire des Juifs à Berlin a toujours été ponctuée de trous, quand on les chassait avec des accusations idiotes. Sans science et avec préjugés, des osties tachées de rouge par des champignons, ça donne : "Les Juifs ont sacrifié des enfants chrétiens et ont versé leur sang sur les osties, virons-les de la ville". Friedrich der Grosse a fait revenir ce peuple après une grosse pause, pour qu'ils aident au relèvement d'une économie à genoux. Pour cela, ils devaient quand même acheter une sorte de green card assez chère pour qu'il n'y ait, hé oui, que des Juifs riches. Cette carte ne pouvait se transmettre qu'à un enfant, ce qui fait que si l'on manquait de sous, il fallait envoyer les enfants suivants hors du domaine dès l'âge de 13 ans ou les cacher en espérant qu'ils ne soient pas retrouvés deux fois ce qui valait une pendaison.
Ouais, ça commence bien.
La guide nous a dit que ce n'était pas dur de repérer les bâtiments devant lesquels elle allait nous parler, puisqu'ils étaient souvent sous protection policière. Elle nous a appris qu'en plus des policiers n'ayant pas toujours l'air très, euh, mobiles, des Israéliens en civil rôdaient dans le coin, payés par le gouvernement israélien. Donc voilà, si on veut une démo de krav maga, s'approcher d'un tel bâtiment avec une fausse bombe.
Ce bâtiment est la maison Leo Beck, où deux institutions juives ont actuellement leurs bureaux, ne me demandez plus lesquelles. A la base il s'agissait d'un lieu de formation, le papa des instituts juifs actuels, et aussi l'endroit où la première femme au monde a reçu son diplôme de rabbin.
Sur la façade, on voit une étoile de David, retirée par les nazis, qui avaient cependant oublié de retirer les cornes d'abondance et le lion, ne les identifiant pas comme signes juifs. Ouf, ils n'ont pas tout eu. Parce qu'en revanche, le musée juif d'à côté de la synagogue, inauguré une semaine avant la prise du pouvoir par les nazis - et dans l'ignorance totale de la suite bien sûr, a été totalement pillé.
Beth Café, c'est le café d'une des deux communautés juives de Berlin, celle qui est orthodoxe. Il est bien sûr fermé pour le Shabbat. J'avoue que j'aimerais bien y aller par curiosité.
Un peu de bonté dans ce monde de brutes, voici l'hôpital catho Ste Hedwige, où des Juifs ont été cachés et sauvés pendant la Shoah. Des femmes juives y ont été employées sous de faux nom, des enfants cachés dans des salles "pathogènes dangereux" où les nazis n'ont pas osé pénétrer, des hommes cachés au milieu de blessés de guerre. Bravo à ces hommes et femmes courageux dont certains ont été déportés à cause de cela.
Dans une cour intérieure malheureusement fermée parce que les habitants se sentaient gênés par les visiteurs, un mémorial a été créé à la place d'une maison détruite pendant la guerre. Les panneaux ont la forme des annonces de décès dans les journaux, et portent des noms de Juifs déportés... et de non-Juifs tués lors du bombardement de la maison à la fin de la guerre.
La visite se terminait devant un ancien cimetière dont les pierres tombales ont toutes été détruites, lui aussi fermé pour le Shabbat. J'ignorais que même les cimetières fermaient ce jour-là. Devant ce cimetière, une sculpture initialement prévue pour le camp de concentration de Ravensbrück. Sur les tombes juives, on pose des pierres, la petite place mémorial en est donc recouverte pour permettre le receuillement devant la statue.
Pas de note joyeuse pour finir le tour, donc. Mais quand même, certains des bâtiments que nous avons vus sont de nouveau occupés par des associations ou écoles juives, ce qui est rassurant. Le thème de l'année à Berlin, pour le fâcheux anniversaire de la prise du pouvoir par les nazis en 1933, c'est Zerstörte Vielfalt, diversité détruite. Tant mieux si elle peut un peu se reconstruire, espérons que ça inspire les Hongrois pas forcément engagés sur un bon chemin si j'ai bien compris.
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