lundi 2 juin 2014

Papa j'ai pris l'autoroute à vélo [...]

[...] Mais je portais mon casque, ne t'en fais pas. Pourquoi ? Il faut lire la suite.

 
 Passage devant l'ex-aéroport de Tempelhof. Pas évident de prendre des photos droites tout en pédalant...

Hé bien, vous voyez, un ami nous a proposé de participer avec lui et d'autres amis de lui comme on le traduirait littéralement à une manifestation à vélo pour la sécurité à vélo dans Berlin [J'aime les phrases longues avec du style piqué aux autres, on dirait. Ici, il fallait reconnaître le style propre au prêtre qui nous a mariés]. La manif est organisée chaque année par une association allemande d'usagers de bicyclettes, avec de multiples itinéraires à consulter ici convergeants tous au centre de Berlin pour un festival sur l'environnement. 

Passage à Kreuzberg
Nous avons accepté sans hésiter, ce qui n'a pas surpris notre ami qui nous a dit qu'il pensait bien que nous accepterions si nous n'avions rien d'autre de prévu. C'est vrai que l'idée d'une grande balade à vélo pour notre sécurité, nous rappelant les manifs plus politiques en RDA contée dans notre chère série Weissensee, était séduisante.


Nous sommes partis de Jungfernheide, pas bien loin de notre appart, avec quelques autres péquenots ou presque.


Un autre cycliste avait un drapeau "Atomkraft, nein danke" ("Energie nucléaire, non merci"), il n'avait pas compris le sens de notre manif pour la sécurité à vélo et non pour touuut ce qui ressemble à une cause écolo. Le drapeau européen était surprenant aussi, mais Dômeu n'a pas réussi à demander à son porteur la raison de sa déco.

Finalement, la foule a vite grossi, en tout nous étions à la fin 200 000 selon ce journal ce qui est la plus grosse manif à vélo du monde. Bon, ce sont les chiffres des organisateurs, difficile d'apprécier de l'intérieur si l'ordre de grandeur était bon ou pas. 

Nous sommes alors devenus une grosse plaie pour les automobilites. Les rues étaient barrées pour nous, sans que ça soit bien indiqué donc des gens ont dû attendre le passage de la foule à des intersections et cela les a bien énervés. En effet, le blocage des rues se faisait sans prévenir aux conducteurs qu'ils s'introduisaient dans des cul-de-sacs. Ils se retrouvaient donc à attendre 3/4 d'heure que nous soyons passés, sortis de leurs voitures, parfois souriants, parfois moins... Et comme nous étions en queue de cortège, nous avons vu des scènes de grande tension entre automobilistes et organisateurs.

[Une solution aurait été de reproduire celle proposée par Lunarbaboon pour les canards. Faisant parti du flux, j'aurais bien aimé voir ce que cela aurait donné, note particulièrement pertinente de Dômeu]

Ce journal local l'avait prévu, titrant "Une manif à vélo énervera les automobilistes dimanche" - ainsi selon un nageur de ma piscine automobiliste on pouvait intelligemment choisir de ne pas rouler ou de rouler sur les bonnes voies. Dômeu m'a dit que je ne pouvais pas diminuer mon sentiment de culpabilité en disant que c'était pas mal d'avoir un jour dans l'année pour se venger de toutes ces priorités grillées par des automobilistes ou de ces stationnements sur nos voies*. M'enfin après au retour il a vu une voiture filer à trop grande vitesse à côté de nous et a dit "J'espère que nous l'avions fait attendre deux heures" [Il s'agissait d'une Porsche qui roulait en zigzagant entre les voitures, avec le bruit caractéristique de cette voiture, 10 fois plus fort que n'importe quel scooter débridé, qui fait que, même en essayant de ne pas y prêter attention, on va quand même tourner la tête. Je HAIS ce type de voiture : elles émettent jusqu'à 112 dB, soit le bruit d'un marteau-piqueur, note de Dômeu].


Des fois nous roulions comme ça, et c'était chouette.

La manif comprenaient des gens de tout âge, et aussi bien des cyclistes pieds nus un peu hippies que des gens très tatoués qu'on imaginerait bien à moto et que des bobos tout droit venus de Prenzlauer Berg (ou de Charlottenburg, d'accord).

Des fois nous étions arrêtés comme ça, avançant à petits pas, et c'était moins chouette. Enfin, ça a été ma délivrance car nous n'avions pas calculé qu'avec un parcours aussi long et aussi ralenti, à un moment mon cerveau n'aurait plus de glucose. Dômeu semble survivre très bien à une longue période sans manger, moi qui ne suis pas diabétique non plus et qui fais du sport à jeûn le matin sans souci ai vite senti que mon petit déj ne suffirait plus à la conservation de mes facultés mentales et que je risquais de faire un malaise ou d'engueuler Dômeu. Bref, heureusement, j'ai eu le temps de faire un détour dans une boulangerie et de sauver notre couple et ma réputation auprès de nos compagnons de route. Vivent les Kürbiskernebrötchen.


Le parcours nous a fait faire un tour quasiment complet de Berlin, avec un passage assez fantastique par le périphérique, dans le tunnel d'abord, où tout le monde criait alors que jusque là la manif était, à quelques sonnettes près, plutôt une manif pour gens coincés comme moi - du genre je suis très heureuse dans ma tête mais ni mon visage ni mes cordes vocales ne vous le révèleront.


Nous en sommes ensuite sortis et c'était toujours aussi agréable de rouler sur l'autoroute, surtout que nous avions de la place et pouvions enfin vraiment pédaler. Admirons au passage la capacité de Dômeu à faire des photos en roulant sans tomber, le ventre vide.

Pas mal de participants ne portaient pas de casques, dont une petite fille alors que souvent les parents sans casques en mettent à leurs petits.

Pour finir, nous avons traversé Tiergarten pour arriver au festival de l'environnement.



Nous y avons seulement acheté du café au lait pour moi car y'en avait or la mousse de lait ne se refuse pas, et à manger pour Dômeu qui se sentait encore bien [mais qui a beaucoup apprécié le pain pita au fromage et aux oignons : festival environnemental oblige, il n'y avait pas grand chose à base de viande... Note de Dômeu]. Le festival était bien fréquenté cette année, apparemment les années passées il pleuvait, ce qui n'aidait pas non plus la manif à vélo. Nous en ignorions l'existence d'ailleurs et étions au ciné regarder un pauvre prisonnier de Guantanamo faire copain copain avec un iguane. Nous avons regardé peu de stands, ce qui est un léger regret car nous aurions ptêt pu récupérer des petits cadeaux gratuits. Mais voilà, nous n'avions plus la tête à débattre transition énergétique et semences écologiques, et à jouer des coudes pour avancer.


Nous avons donc atterri dans une gelateria près de chez nous, que Dômeu n'avait jamais remarqué, ptêt parce qu'il connaît encore moins de mots italiens que moi. De la glace, une San Pe, la vie est revenue en nous et nous nous sentons prêts à recommencer une telle aventure une autre fois.

* Note de Dômeu : Ce lundi matin, je croise un collègue dans le métro : "Tu as vu la manifestation à vélo ? - Oui, j'ai été coincé avec ma petite fille de 4 mois pendant 1/2 heure dans la chaleur et les gens énervés, parce que nous voulions aller faire un barbecue à Tempelhof." Je n'ai pas osé dire que je faisais parti du cortège...

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