dimanche 11 août 2013

Sachsenhausen

Dans la suite logique de ma visite du mémorial de la conférence de Wannsee, Dômeu et moi nous sommes rendus dimanche dernier à Oranienburg, bourgade à quelques kilomètres au Nord de Berlin, visiter le camp de concentration de Sachsenhausen, ouvert par les Nazis en 1936, repris et réutilisé par les Soviétiques à la fin de la guerre. Un petit camp, certes, mais malheureusement prototype de ce qui sera ensuite utilisé pour toutes horreurs perpétrées en Europe à l'époque, avec en prime la présence de l'administration générale de tous les camps nazis sur place. De ce fait, Sachsenhausen a été un terrain d'essais pour développer de nouvelles punitions ou de nouvelles formules des gaz de mort. 


Avec une de mes collègues et son compagnon, nous avons pris part à la visite guidée anglophone proposée par le mémorial. 

Les limites du camp et l'actuel centre d'accueil du camp


On nous a, je trouve, bien expliqué les choses, on étant une jeune étudiante, nous avons pu repartir de là bien formés, avec des images pas drôles en tête.

  
A droite, une ancienne structure rattachée au camp, celle de la formation des SS. D'illustres monstres, tel celui qui sera chargé de fonder le camp d'Auschwitz (Rudolf Höss), ont débuté ici leur carrière. Maintenant, a dit la guide avec une légère grimace, il s'agit d'une école de police.

A gauche, l'ancien resto des officiers, qui lui, ne s'est pas transformé en cafét' depuis.


Ce joli endroit boisé devait être encore plus beau lorsque le camp était en fonctionnement, il s'agissait alors d'un espace vert pour les SS, comprenant même un étang avec des poissons rouges. 
 

L'entrée de la zone de détention semble bien mignonne comparée à celle d'Auschwitz telle qu'on la voit par exemple sur les affiches actuelles du centre Wiesenthal promettant une récompense à ceux pouvant donner des infos sur des nazis cachés. Mais qu'on ne s'y trompe pas, il s'agit bien d'un camp, où on a enfermé des prisonniers politiques, des criminels, des "antisociaux" (chômeurs par exemple), des tziganes, des Juifs, des homosexuels, et où on les a fait durement travailler dans d'atroces conditions en sachant très bien que ça les tuerait, la conférence de Wannsee l'avait prévu. Dans la fabrique de briques de Sachsenhausen, l'espérance de vie était de quelques semaines.

Un élément qui a marqué Dômeu : depuis cette tour toute la zone de détention et ses baraques étaient visibles, de là on pouvait tirer sur tout prisonnier un peu suspect. 



La zone de détention était entourée de cette bande sur laquelle il était interdit de s'aventurer, sinon on se faisait tuer sans avertissement. Le panneau l'indique, en Allemand, pratique pour les prisonniers non germanophones. Les soldats tuant des prisonniers sur les graviers recevaient une récompense comme une journée de congé ou une petite bouteille d'alcool, des survivants racontent que du coup, certains poussaient des prisonniers sur les graviers pour pouvoir les tuer.
 

Les prisonniers étaient entassés dans de telles baraques, toutes détruites, certaines reconstruites pour le mémorial, dans des conditions d'hygiène déplorables à cause de la densité. Ils travaillaient douze heures par jour avec une quantité de nourriture ridicule, après quoi ils étaient comptés debout, des heures parfois si quelqu'un manquait, puisqu'il fallait attendre de le retrouver. Il n'était pas rare que des prisonniers s'effondrent lors de ce comptage interminable. 

Privation de nourriture, de sommeil, dur travail, surpopulation, hygiène très mauvaise... Superbe équation, on l'aura compris.

 
Des fours crématoires

Mais ce n'est pas fini. Une petite chambre à gaz a servi à faire des tests de produits, certains ont donc péri ainsi. D'autres ont servi de cobayes à l'infirmerie. Et d'autres ont été fusillés. Notamment des milliers de prisonniers de guerre soviétiques qui attendaient sagement dans le vacarme d'une musique militiaire très forte, pensant se rendre à une visite médicale. Que nenni. Une fois que le soldat était nu sous la toise, un soldat dans la pièce d'un côté tirait profit d'un trou dans le mur pour l'abattre d'une balle dans la nuque. Et au suivant. En quelques semaines, des milliers de morts, brûlés comme toutes les autres victimes du camp dans un four comme ceux du dessus. Fours gérés par des prisonniers, bien sûr.

Les habitants de la ville n'ont pas pu ignorer ce qui se tramait dans le camp, voyant les convois arriver à la gare, et constatant que selon le vent, leur linge blanc à sécher dehors se couvrait de cendres.



Comme ces cendres ont été enterrées de ci de là, déplacées pour certaines, mises sur les sentiers du camp, il n'y a pas d'endroit de recueillement en particulier dans ce mémorial, le camp entier est comme un cimetière, ce qui demande un certain respect. Les pique-niques sont ainsi interdits dans l'enceinte, clairement certains n'ont pas compris le message, mangeant des sandwiches sur des bancs.


Les soviétiques ont utilisé le camp après la guerre pour y enfermer notamment des gens soupçonnés d'avoir été nazis, sans preuves. Plus de travail mais des conditions de détention pas encore terribles. Et un détournement de la mémoire, cette colonne ne comporte ainsi que les triangles rouges dont étaient affublés les prisonniers politiques, comme si ce camp n'avait servi qu'à l'extermination de communistes... Heureusement, maintenant, le souvenir de tous est rappelé dans ce mémorial. Et comme je l'ai déjà souligné après ma rencontre de négationnistes à Wannsee, mieux vaut ne pas oublier !

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